mercredi 21 novembre 2012

EDF, la saga, fin



EDF, troisième épisode, suite et fin

«EDF» n’a toujours pas appelé. C’est fichu, à présent. Le curé est navré car il ne peut plus recharger son portable. Tiens, il commence à prendre conscience que pour lui aussi, c’est ennuyeux. Demain, peut-être ? Je n’ai même plus la force de me révolter. Et auprès de qui, à cette heure ? Je vais ranger la galerie. Lourde tâche. Agréable, au fond.

Miracle, coup de théâtre, «EDF» a appelé… vers dix sept heures trente. Les ons techniciens cette fois, les vrais, les seuls qui valent la peine. Des ons chirurgiens, des ons tranchants. Un peu gênés. Est-ce que ça vous embête si on ne vient que demain ? Parce qu’il est tard, comprenez- vous, et, etc... Mon énergie revient d’un coup, finalement intacte. Je hurle. Bon, d’accord, ils vont venir. Je fonce. Un embouteillage à Pont d’Avène. Un accident ? Ce n’est pas possible. Je suis décidément maudite. Cela n’arrive jamais. Et il faut que ce soit juste aujourd’hui… Je coupe la file, je slalome, portable sur les genoux. Ouf, je suis passée, sous l’œil stupéfait des quidams qui attendent sagement à la queue leue leue. Alléluia. Soubeiranes. Je les vois enfin, garés vers le pont. Merci mon Dieu. Un camion bleu. Le gars qui est au volant me fait signe d’y aller, il me suit. J’y «vais» donc. Personne derrière moi. Il doit manœuvrer sans doute. Le curé sort, joyeux. Ils arrivent. Enfin ! On descend vers le portail. Et on regarde le chemin. Bêtement, car il n’y a rien à voir. Anne ma sœur Anne… On se sent dépendants, stupides mais ça ne fait rien, on reste là, figés comme des santons. On attend. Personne. Il est dix-neuf heures à présent. Ca, c’est mauvais. Mais où sont-ils passés ? Vous êtes sûre que vous les avez bien vus ? S’enquiert le curé, qui redoute une hallucination. Oui. Il ne faut pas plus de trois minutes du pont pour arriver ici. Je le sais bien. Il se désespère. Moi aussi. Je rappelle deux fois le 810. Quimper, comme d’habitude, ils ne savent pas etc… Je raccroche, après un merde retentissant, ça y est, j’ai craqué.

Je retourne au pont à toute allure. S’ils étaient partis ? S’ils s’étaient perdus ? C’est arrivé. Je manque d’emboutir un vieux monsieur en voiture qui marque trop longuement le stop. Dégage connard, je ne l’ai pas dit mais bel et bien pensé. Ca y est cette fois, je suis folle.

Le camion est toujours là, ouf. Je me gare en double file sans mettre le clignotant. J’entends derrière moi crisser des freins. Une moto fait un écart. On est toujours au volant, à l’arrêt. Placide, on écoute la radio, on a visiblement la vie devant soi. Il attend, me dit-il. Mais quoi ? Qui ? L’autre. Quel autre ? Il faut qu’on soit deux. Pourquoi ne pas me l’avoir dit ? Ca fait deux fois que j’appelle. Il ne savait pas. Vous vous rendez compte que vous rendez les gens dingues ? Non. Re coup de freins. J’y vais, c’est dangereux. Le Ranquet, encore. Je rassure le curé qui en pleure presque. Si près du but, mon Dieu et puis plus rien… C’est trop injuste. Je le lui certifie, ils vont venir. Ils arrivent. Les voilà !!! Tous les deux. Ils rétablissent en trois secondes, sans même nous faire l’aumône d’un regard. Mais je les attends de pied ferme pour le dernier acte vengeur.

Discussion animée à laquelle, ô stupeur, participe fortement le curé, qui, caché derrière moi, crie et gesticule, les traitant indirectement de feignants de fonctionnaires, ce qu’ils ne sont pas. Le ton est si soutenu que j’ai peur à un moment que, par mesure de rétorsion, ils recoupent. Ces hommes à pinces sont puissants et dangereux. Marina passe et repasse en quatre quatre devant le portail… et ralentit à chaque fois, braquant légèrement son engin, mine de rien, sous prétexte de malhabileté et d’étroitesse du passage, vers le dégagement de l’allée où, tout en en haut, comme sur une scène de théâtre, a lieu le dernier acte, très enlevé, de la pièce «Irène et EDF». (C’est tout à fait inutile, le camion est bien garé, et elle est une conductrice macho, toujours à fond, mais plutôt dégourdie ; malgré ses pointes de vitesse dangereuses dans ce chemin en terre battue, elle n’a jamais écrasé un enfant, ce qui est tout à fait remarquable.) J’ai envie de lui lancer: arrête toi carrément, tu économiseras de l’essence et ce sera plus facile pour écouter.

Ils n’ont pas été prévenus que je les attendais hier. Non, il n’y avait pas particulièrement de travail ni d’urgence ce jour là. Mais c’est que voilà : c’est le «Central» qui appelle «Nîmes» ; ensuite «Nîmes» qui appelle «Malaigues» ; puis «Malaigues», les Chefs de Soubeirannes ; et enfin les Chefs, eux… Un travail délicat, comme on peut voir, en quatre actes essentiels. Où diantre le fil a-t-il rompu ? On ne sait pas. Ce n’est pas eux, en tout cas, ils ne demandaient qu’à me rétablir, ils ne sont pas mauvais bougres, et ça prend deux secondes, vous avez vu, et en plus, il n’y avait pas grand-chose à faire hier après-midi. C’est les Chefs… (?) En tout cas, les risques de thromboses anévrismales augmentent en proportion du nombre d’étapes dans tous ces ordres sinueux répercutés. Ils en conviennent et me conseillent de leur faire une lettre, à ceux de Nîmes. Puisque eux n’y sont pour rien. Fin de l’épisode. Le curé a l’électricité. Dieu soit loué. Je sens en moi la satisfaction du devoir accompli. Bêtement. A ce propos, il a oublié de me payer.
Je file à Atuargues. L’instit m’attend.



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